Il me semble évident que la musique contemporaine traverse une crise, notamment dans sa diffusion. Une des façons, à mon avis, de résister à cette donne, c’est d’investir tous les espaces qui nous sont offerts. Nous ne pouvons plus nous conformer seulement au concert classique, il faut attirer de nouveaux publics et investir différents genres: contes musicaux, ciné concert, musique avec les arts du cirque, opéra, théâtre musical, installations... Une des vertus les plus intéressantes du Ciné-Concert c’est avant tout, le « rapport à l’autre ». Nous sommes obligés, le temps de l’écriture, de vivre ensemble avec les problématiques de « l’autre », et on finit par se les approprier. Confrontés à des situations inédites, nous devons trouver des solutions musicales que nous n’aurions jamais imaginées autrement, c’est cela qui alimente et magnifie notre imagination et l’imagination, c’est le moteur qui fait avancer les choses !

 

Pour l’atelier Collaboratory Ciné-Concert, les étudiants ont sélectionné trois courts métrages d’animation – très imaginatifs! – de la série Out of the Inkwell de Max Fleischer (Invisible Ink (1921), Bubbles (1922), Trip to Mars (1924)) et The Cook de Buster Keaton (1918). Chacun choisira 7 ou 8 minutes du film et il y aura un challenge supplémentaire... celui d’imaginer une œuvre à trois et en faisant particulièrement attention aux transitions entre les différents compositeur.ice.s ! Mon travail durant cet atelier sera de les sensibiliser à tous les aspects inhérents aux films, et en même temps veiller à suivre la composition: du travail formel à l’ergonomie de l’écriture pour la percussion. Sur ce dernier point, ils auront aussi le concours d’Éric Sleichim directeur artistique de BL!NDMAN et des percussionnistes de l’ensemble. Le rôle du montage est primordial pour l’articulation des paramètres musicaux: introduire ou développer les timbres, les matières, définir les phrases, les séquences...

Je leur ai parlé aussi des points de rencontre qui sont fondamentaux pour créer un lien entre la musique et l’image. En fait, les éléments visuels qui peuvent générer du matériel musical sont extrêmement variés, allant du rythme du montage, aux jeux d’ombres et de lumières, à la caractérisation des personnages, au contenu narratif ou abstrait du scénario, à la composition architecturale des plans visuels, il faut éviter l’illustration, et donner un sens musical aux sons, construire quelque chose avec, sinon ça reste anecdotique, et ça n’a plus d’intérêt !

 

J’essaye aussi de leur transmettre comment trouver une relation vertueuse avec le film, en prenant et cédant la place quand il le faut, en d’autres termes, créer un contrepoint de plans sonores et visuels et ainsi créer un nouveau spectacle résultant de cette interaction.

 

Propos recueillis par Héloïse Demoz, musicologue.

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